Homélie du 14 décembre 2017 (St Jean de la Croix)



« Ne vous proposez jamais pour modèle de vos œuvres, un homme quelque saint qu’il soit, car le démon vous représenterait ses imperfections. Imitez plutôt Jésus-Christ, qui est souverainement parfait et souverainement saint, et vous ne vous tromperez jamais ». (Maxime n° 79, page 1191, éd. P. Grégoire).
            Cette maxime de Saint Jean de la Croix, que nous célébrons aujourd’hui, montre bien le pourquoi de sa sainteté. En effet Jean de la Croix n’a pris pour modèle que le Christ et lui seul, et c’est donc la raison qui lui a permis d’atteindre la sainteté et la glorification par l’Eglise, et ce pourquoi nous le fêtons solennellement en ce 14 décembre, jour de son décès.
            A l’Eglise de Fontiveros en Castille (Espagne), non loin d’Avila,  au nord ouest de Madrid, une plaque a  été apposée aux fonts baptismaux qui dit ceci :
            « A cette fontaine a été baptisé le docteur mystique saint Jean de la Croix, premier carme déchaux, lustre et honneur de ce noble village de Fontiveros dans lequel il a puisé ses origines. Il naquit en l’an 1542 le 24 juin et mourut le 14 décembre 1591. La présente plaque a été apposée en 1660 ; Joseph Velado étant curé ».
           
Jusqu’à une époque récente on a toujours considéré que le prénom de Jean (Juan) lui a été donné en référence au Baptiste, et non pas d’abord à l’évangéliste. Ceci est affirmé par Julien d’Avila, chapelain du premier monastère de St Joseph, fondé justement à Avila par Saint Thérèse. Julien d’Avila connaissait bien la grande Thérèse qu’il accompagnait dans se fondations et il a dû plusieurs fois rencontrer saint Jean de la Croix, lorsque celui-ci était avec la grande réformatrice..
            On pourra se rappeler dans le même sens que le prénom de baptême de François d’assise était aussi Jean-Baptiste. Lorsque avant on parlait de St Jean c’était presque toujours pour le Baptiste. 
            La famille de Jean de la Croix était originaire du village de Yepes pas loin de Tolède, d’où son nom Jean de Yepes. Peut-être a-t-il eu quelque parenté juive comme Ste Thérèse.
            Ses parents Gonzalo de Yepes et Catalina (Catherine) Alvarez s’étant installés à Fontiveros c’est là qu’il est né. Il a eu deux frères dont l’un est mort très jeune. Et son père est décédé alors que lui Jean était encore petit enfant. 
            Alors qu’il avait une dizaine d’années sa mère vint s’installer dans la ville de Médina del Campo qui sera celle où il a le plus vécu, ce que l’on oublie parfois. C’est dans cette ville qu’il fera la majeure partie de ses études, spécialement au collège des Jésuites. Et à 21 ans, en 1563, il entrera au couvent de l’Ordre de N.D. du Mont Carmel, dans cette ville. Il y a prendra, ou on lui donnera le nom de Jean de St Matthias, sans doute parce qu’il y est entré pour le 24 février, qui était la fête de cet apôtre, et le mercredi des cendres.
            Notre saint rencontre pour la première fois Sainte Thérèse d’Avila, juste après son ordination sacerdotale, au Carmel de Medina del Campo qu’elle venait de fonder pour l’Assomption 15 août 1567. Elle le rencontre   le mois suivant en septembre 1567.
            C’est à la demande expresse de Notre Mère la grande Thérèse qu’il entreprend la réforme de la branche masculine de l’Ordre du Carmel, et ceci, par la fondation du couvent de Duruelo, le 1° dimanche de l’Avent 28 novembre 1568. Première fondation des carmes déchaux, dédiée à Notre-Dame du Mont Carmel.  Notre saint va prendre ce nom de Jean de la Croix à partir de cette fondation de Duruelo. Il va ensuite vivre dans de nombreux couvents, en Castille en particulier à Ségovie où se trouve son corps, et en Andalousie, en particulier à Grenade. Il meurt dans la nuit du samedi 14 décembre 1591 à Ubeda. Son corps est donc transféré à Ségovie (mai 1593), où il est toujours vénéré.
            Le pape Cléments X le béatifie le 25 janvier 1675, fête de la conversion de St Paul. Benoît XIII, le canonise le 27 décembre 1726, pour la fête de l’apôtre St Jean.
            Pie XI le déclare Docteur de l’Eglise le 24 août 1926, (St Barthélémy), anniversaire de la Réforme du Carmel par Saint Thérèse avec la fondation du 1° couvent dédié à St Joseph au quartier Saint Roch d’Avila.
            Le mystère de la croix nous montre bien ce que le Seigneur a voulu nous transmettre par notre saint : ainsi dans ce sens la primauté absolue de Dieu, manifestée dans le Christ par l’Esprit, et la nécessité du détachement de tout chose pour parvenir, dès ce monde, à l’union avec l’Amour du Dieu-Trinitaire dans le mariage spirituel,  Toutefois l’enseignement qu’il nous donne est aussi tout son simplement son nom.
            En effet comme nous avons commencé un peu à le voir, si Jean est son nom, il y a bien deux Jean : le Baptiste et l’Evangéliste. Or notre saint représente la mission et l’enseignement de ces deux grands saints. Par toute la première partie de ses écrits, c’est-à-dire la Montée du Carmel et la nuit obscure, Jean de la Croix témoigne bien du Baptiste et de son baptême justement  de pénitence et de conversion. Puis par son cantique spirituel et sa Vive Flamme d’Amour il montra le mystère de l’union par amour qui caractérise l’Evangéliste.
            Dans ce sens Jean de la Croix mérite bien d’être sous le patronage de ces deux illustres prédécesseurs. Il peut être intéressant de noter que le Cantique spirituel, décalque du Cantique des Cantique et la Vive Flamme d’Amour, expression de l’Esprit-Saint sont dédiée à deux femmes. Et dans ce sens la petite Thérèse, comme Elisabeth de la Trinité ont surtout connu et très apprécié saint Jean de la Croix à partir de ces deux écrits de l’union d’amour avec Dieu.
            De plus Saint Jean de la Croix est un parfait fils du prophète Elie, et c’est pour répondre à l’appel de la grande Thérèse qu’il a participé à la réforme du Carmel. Thérèse qu’il appelait sa Mère, et dont il n’a jamais voulu prendre la place. Dans ce sens donc il est Elianique (fils de St Elie) et Thérésien (fils de Ste Thérèse), et donc un modèle pour nous, surtout au Carmel.
            Enfin rappelons ces extraits de l’Ecriture prévus et choisis volontairement pour notre saint et qui lui conviennent parfaitement, mais qui conviennent aussi pour chacun d’entre nous. Du prophète Isaïe : « Parole du Seigneur : C’est moi qui t’ai créé, Jacob, qui t’ai formé, Israël »... » Je suis le Seigneur ton Dieu, le Saint d’Israël ton Sauveur... tu as du prix à mes yeux et je t’aime ». Du psaume 138 : « ... la nuit devient lumière autour de moi. Même la ténèbre pour toi, n’est pas ténèbres, et la nuit, comme le jour est lumière ! »
            De St Paul dans sa lettre aux Romains, notre deuxième lecture :
            « ... tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu... poussés par cet Esprit nous crions vers le Père en l’appelant : « Abba ! » C’est donc l’Esprit-Saint lui-même qui affirme à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu ».
            Et dans l’évangile la célèbre prière sacerdotale, au chapitre 17 de St Jean          :
            « Je leur ai fait connaître ton nom, et je le ferai connaître encore, pour qu’ils aient en eux l’amour dont tu m’as aimé, et que moi aussi, je sois en eux ».
            Alors en ce temps de l’Avent mettons l’Amour, l’Amour de Dieu et des autres à la base de tout notre être, de tout ce que nous faisons.
            Enfin, n’oublions pas qu’après et dans le Christ-Jésus son divin Fils, c’est Marie Immaculée sa Mère et notre Mère, qui a le mieux vécu le mystère d’Amour, et que St Jean de la Croix est aussi un digne enfant de Notre-Dame, dans son Ordre du Carmel, l’Ordre de la Vierge, comme le nomme presque toujours notre Mère Sainte Thérèse.
            Et tout ce mystère nous le célébrons dans l’Eucharistie, comme l’a si  bien fait notre Saint.
                                                                                                                                                         AMEN.

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