Homélie du 24 décembre 2019 - Messe de la nuit


Chers frères et sœurs, parmi toutes les œuvres que Dieu a accomplies, dans le temps et en dehors de Lui-même, l’Incarnation rédemptrice du Verbe est la plus grande. La plus grande, parce qu’elle a pour fin, non une simple créature, aussi sublime soit-elle, mais Dieu lui-même, le Verbe éternel, qui se charge, dans le temps, d’une nature humaine. La plus grande, parce qu’étant la suprême manifestation de l’amour miséri­cordieux de Dieu, elle est l’œuvre qui Le glorifie le plus, et Le glorifie précisément par rapport à la charité, essence même de Dieu. La plus grande œuvre de Dieu enfin, à cause du bien immense qu’elle procure aux hommes. 
En effet, le salut, la sanctifi­cation, la félicité éternelle de tout le genre humain dépendent complètement de l’Incarnation de Jésus, le Verbe Incarné. Dieu le Père « nous a élus dès avant la création du monde, pour que nous soyons saints et irréprochables devant Lui... En Lui, nous avons la rédemption..., la rémission des péchés, selon la richesse de sa grâce... En Lui, nous avons été prédestinés... Dieu nous a rendus vivants avec le Christ. Il nous a ressuscités avec Lui et nous a fait asseoir dans les cieux en Jésus Christ ». (Ep. 1,4-11, ; 2,5-6). Jésus, le Verbe Incarné, est l’unique source de notre salut et de notre sainteté. Sans Lui, l’homme ne pourrait appeler Dieu du doux nom de Père, il ne pourrait L’aimer comme un fils, il ne pourrait jamais espérer être admis en son intimité. Il n’y aurait ni grâce, ni vision béatifique de Dieu. Sans Jésus, l’homme serait emprisonné dans les limites d’une vie purement humaine et privé de tout horizon surnaturel, tant dans le temps que pour l’éternité.
Or, frères et sœurs, l'Incarnation du Verbe, la plus grande œuvre de Dieu — destinée à illuminer et à sauver le monde entier — s’accomplit dans l’obscurité, dans le silence, dans les circonstances les plus humbles et les plus humaines. L’édit de César oblige Marie et Joseph à quitter leur petite maison de Nazareth, et les voilà en chemin ; ils vont à pied comme les plus pauvres, malgré l’inconvénient de la grossesse de Marie qui arrive bientôt à son terme. Joseph et Marie ne se sont pas crus autorisés à remettre le voyage, ils n’ont fait aucune objection, et ont obéi avec promptitude et simplicité. Celui qui commande ce recensement est un homme, mais leur profond esprit de foi décou­vre dans le commandement de l’empereur païen, la volonté de Dieu. Et ils cheminent se confiant en la Providence : Dieu sait, Dieu pourvoira : « tout coopère au bien de ceux qui cherchent Dieu », nous dira plus tard l’apôtre Paul. A Beth­léem, il n’y a pas de place pour eux et il ne leur reste qu’à s’abriter dans une grotte au abord de Bethléem. La misère de ce refuge d’animaux, ne les déconcerte pas, ne les scandalise nullement : ils savent que l’Enfant qui doit naître, est le Fils de Dieu, mais ils savent aussi que les œuvres de Dieu diffèrent totalement de celles des hommes !

Or, si Dieu veut que sa plus grande œuvre s’accomplisse là, dans cette misérable étable, dans le dénuement le plus extrême, Marie et Joseph n’ont rien à répliquer ! Un brin d’esprit humain aurait suffi à les désorienter, les déconcerter, faire jaillir un doute... Marie et Joseph sont profondément humbles, c’est pourquoi ils sont dociles et pleins de foi en Dieu. Selon sa coutume, Dieu se sert de tout ce qui est humble et méprisable aux yeux du monde, pour accomplir la plus magnifique de ses œuvres : l’Incarnation du Verbe.
Frères et sœurs, quel contraste lumineux et sublime ! Jésus, Verbe éternel, Verbe incarné, source de vie, de salut, de grâce et de sainteté ; Jésus, lumière et rédemption de I’humanité entière, est sur le point de se montrer au monde ! Toutes les créatures créées devraient exulter, toute la nature devrait frémir de joie, tous les hommes devraient accourir à la rencontre de leur Dieu, de leur Roi, de leur Sauveur ! Mais notre Dieu et Sauveur, Jésus-christ choi­sit, au contraire, de naître dans le secret, la solitude, le silence et tout est prédisposé à cette fin. Notre Sauveur vient du ciel pour sauver le monde et ce monde qui est le sien, qui est l’œuvre de ses mains, n’a pas même de logement à Lui offrir ! L’humble petite maison de Nazareth était prête à L’accueillir : Marie l’avait préparée avec tant d’amour, mais Lui n’a même pas voulu cette humble demeure et Il a tout disposé de manière à n’avoir rien où reposer la tête. Bethléem est plein de visiteurs, il y a un coin pour tous ; mais pour Lui, le Visiteur royal, le Créateur, le Roi de l’univers, il n’y a pas de place. Voici qu’Il vient à nous comme un misérable pèlerin sans savoir où passer la nuit. Personne ne connaît son passage, personne n’est au courant de son apparition imminente, personne ne peut supposer que cette humble femme de Nazareth est sur le point de donner au monde son Sauveur, son Roi, son Dieu. Seuls Marie et Joseph savent et adorent en silence ! Rien ne les trouble : leur cœur est inébranlable dans leur foi, il est ancré en pleine confiance : ils sont sûrs des promesses de Dieu.
Demandons en cette nuit de Noël au Verbe incarné, d’imprimer profondément dans nos cœurs cette leçon d’humilité et de pauvreté qu’Il a lui-même emprunté afin de mieux comprendre les voies mystérieuses de son amour. Jésus vient pour nous sauver, nous sanctifier, mais Il veut aussi accomplir en nous son œuvre par l’intermédiaire des circonstances, des événements les plus humbles, les plus communs et les plus insignifiants.
Que la fête de Noël nous trouve toujours plus semblable à Celui qui, en ce temps, est devenu enfant par amour pour nous ; que chaque nouveau Noël nous trouve plus simples, plus humbles, plus saints, plus charitables, plus résignés, plus heureux, plus remplis de Dieu… Demandons-Lui aussi l’humilité, la foi, la confiance aveugle de Marie et de Joseph, afin que nous sachions reconnaître et adorer son œuvre en y adhérant avec docilité et amour... Amen.

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