Homélie du 30 décembre 2018 - Ste Famille


      Frères et sœurs, en ce dimanche après Noël où nous fêtons la « sainte famille de Nazareth », il est important de rappeler que la famille est une réalité voulue par Dieu comme lieu d’introduction au monde extérieur mais aussi lieu de découverte de l’amour divin…

Cette famille est donc formée nécessairement d’un homme et d’une femme, seule image complète de l’humanité. Sans juger personne, il est important de ne pas accepter de com­promis sur ce point. Deux hommes ou deux femmes ne peuvent pas introduire un enfant à la réalité d’un monde fait d’hommes et de femmes dans la différence et la complémentarité des psychologies et des talents. C’est de l’altérité que jaillit la richesse du don.
Mais cela ne suffit pas. Les enfants, pour se construire, ont besoin de sécurité et de la stabilité sinon le monde est, pour eux, incertain et effrayant. Ils ont besoin de savoir que l’amour vrai ne revient pas sur sa parole et ne change pas au gré des fluctuations affectives…
Le Pape François rappelait avec force que « … l’absence du père marquait gravement la vie fa­miliale, l’éducation des enfants et leur insertion dans la société… Cette carence prive les enfants d’un modèle de réfé­rence du comportement paternel. » (Amoris Laetitia – n°55)

Or, tout cela trouve un prolongement spirituel. La famille est la première réalité d’Église. Les enfants forgent leur image de Dieu le Père à partir de leur propre père terrestre. Ils com­prennent la tendresse de Dieu à partir de celle de leur mère et forment souvent leur capacité de confiance en fonction de la confiance vécue dans la relation d’amour de leur parent. Ils trouvent dans cette relation réciproque une image - lointaine certes, mais réelle - de la vie trinitaire où un seul amour forme une seule réalité indissoluble, sans que les personnes soient confondues.

Pour autant, tout le monde aujourd’hui n’a pas cette chance et ce n’est pas nécessairement un obs­tacle car Dieu pourvoit toujours. Une belle illustration nous est offerte par la vie de sainte Mariam - sœur Marie de Jésus Crucifié (1846-1878), la « petite Arabe » - une carmélite palestinienne, canonisée par le pape François le 17 mai 2015, et dont la vie fut très mouvementée. Alors qu’elle avait trois ans, son père, sur le point de mourir, se trouva dans l’angoisse de laisser seule sa fille ; son épouse devait mourir quelques jours après. Il se tourna alors vers une image de Saint Joseph et le supplia : « Grand saint, voici mon enfant : la sainte Vierge est sa mère, daigne veiller, toi aussi sur elle, sois son père. »
Cette intuition spirituelle était très juste : à saint Joseph a été confiée rien moins que l’éducation du Fils de Dieu... Lorsque l’Évangile note qu’« Il leur était soumis », cela s’entend surtout du « chef de famille », Joseph. Lui, pauvre pécheur, devait diriger la vie à Nazareth. Il présidait en particulier la prière familiale devant la Vierge Immaculée et la deuxième Per­sonne de la Trinité !

Demandons ce matin, par l’intercession de la Sainte Famille, que le Seigneur protège les familles afin qu’elles deviennent de plus en plus des icônes de la vie trinitaire.
Pour la majorité d’entre nous, nous avons reçu notre foi chrétienne aux seins de notre famille, par nos parents ou grands parents et peut être avons-nous bénéficié d’enseignements catéchétiques qui nous ont permis de prendre à notre compte cette foi que nous avions reçu enfant mais dont les enjeux nous étaient inconnus alors…
Il est toujours beau et enrichissant de lire dans la vie des saints comment l’éveil de leur vocation à commencer. Celle-ci met parfois un certain temps à se réaliser.
La vocation religieuse ou sacerdotale doit pouvoir s’épanouir normalement dans la fa­mille naturelle, surtout si elle est chrétienne. C’est un don de Dieu et le signe que la foi a été transmise. Si nous craignons que l’un de nos enfants soit appelé par Dieu, interrogeons-nous sur ce que cela cache de possessivité et de manque de foi en la vie surnaturelle, de confiance en l’amour du Seigneur. La vocation ne détruit pas nos enfants, elle les réalise. Nous n’avons d’ailleurs pas à donner nos enfants au Seigneur car ils ne nous appartiennent pas. Ce sont eux qui se donnent. Puissions-nous ne pas être un obstacle à l’appel de Dieu et à la générosité de nos jeunes.
En revanche, il est bien sûr naturel de ressentir le départ de nos enfants surtout lorsque leurs choix nous déconcertent. A force de vivre avec eux, nous oublions souvent qu’ils ne font pas partie intégrante de nous-mêmes, sont différents de nous et doivent partir. C’est exactement ce qui arrive à Marie et Joseph dans l’épisode de ce jour. Ils connaissent tous deux l’origine divine de Jésus, mais avec le temps, il est devenu pour eux un enfant ordi­naire, leur enfant, au point qu’ils s’étonnent de le trouver au milieu des docteurs de la Loi et que sa réponse les prend de court. Dans une moindre mesure, nos enfants aussi viennent de Dieu et sont faits pour Dieu et non pour nous. Ce doit être toujours notre joie.

Frères et sœurs, le sommet de toute la liturgie de ce dimanche est clairement dans la réponse de Jésus à Marie, si profonde et souveraine. Il affirme devoir être « aux affaires de son Père »
Jésus nous enseigne comment être fils, précisément dans le fait d'être avec le Père dans la prière.
En ce dimanche, Jésus nous donne un témoignage : en restant dans le Temple, en pré­sence de Dieu et en revendiquant sa mission, il nous conduit à nous interroger sur l’ardeur de notre amour pour Dieu et pour sa maison, l’Église.
Jésus avait le cœur brûlant en entrant dans la maison de son Père. Qu’en est-il de nous dans la prière, à la messe, à l’office si nous sommes religieux ? Nous confessons-nous dans la joie en nous émerveillant de la miséricorde de Dieu ? Avons-nous le désir d’aller l’adorer, même si nous ne ressentons rien de particulier, mais simplement parce que nous savons qu’il est là et qu’il nous aime ? Sommes-nous des passionnés de la Parole de Dieu ? Nous posons-nous comme Jésus, des questions, cherchons-nous des réponses ou pensons-nous en savoir assez ?
Jésus brûle aussi d’amour pour la maison de son Père et veut s’occuper de ses affaires. Plus tard, il prêchera dans le Temple, il le purifiera de ses marchands et y affrontera des contradicteurs mais, par amour pour les hommes, et pour les sauver, il ne se découragera pas. Il prophétisera que ce Temple est comparable à son corps. Nous qui sommes devenus enfants de Dieu et fils de cette maison, l’Église, partageons-nous son zèle ? Avons-nous à cœur, à temps et à contretemps, d’annoncer l’Évangile, seul vraie source de bonheur ? Face aux hommes qui s’égarent loin du Dieu qui les aime et est mort pour eux, reprenons-nous à notre compte le cri de saint Dominique : « mon Dieu, ma miséricorde, que vont devenir les pécheurs ? »
En guise de conclusion, voici une prière d’Origène que sainte Marie de Jésus Crucifié affectionnait particulièrement, et qui pourra nous aider pour notre méditation : « Esprit Saint, inspirez-moi ; Amour de Dieu consumez-moi ; au vrai chemin conduisez-moi ; Marie ma Mère regardez-moi ; avec Jésus, bénissez-moi ; de tout mal, de toute illusion, de tout danger préservez-nous. »                           AMEN.

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