Homélie du 03 juin 2018 - Solennité du TS Sacrement


            Frères et sœurs, avant de commencer le commentaire de la Parole de Dieu, j’aimerai revenir sur la question qui nous a été posé par le Père Claude, la semaine dernière à savoir : pourquoi l’appellation de « fête Dieu » n’est-elle pas attribué à la solennité de la Sainte Trinité, que nous avons célébré dimanche dernier ? C’est en allant à Toulouse cette semaine que j’ai eu la réponse auprès d’un frère qui porte le mystère du TS Sacrement. Je l’ai provoqué comme notre frère Claude… Et la réponse a été immédiate : cela est lié aux processions du Saint Sacrement. En promenant le St Sacrement à travers les rues de la ville, on fêtait Dieu, d’où le nom de « Fête Dieu ». Je ferme maintenant la parenthèse pour revenir à la magnifique fête du TS Sacrement.              
Il nous faut bien reconnaître, tout d’abord que l’Eucharistie est un mystère déconcertant pour la raison humaine ! Il est d’ailleurs étonnant, quand on y pense, que depuis plus de 2000 ans et sans interruption et dans toute l’Église chrétienne, du pain et du vin ont été consacrés et offerts comme le Seigneur l’avait voulu et en mémoire de Lui.
Au cours de la messe, nous nous trouvons donc là devant une réalité très précise, très concrète, que nous voyons, que nous pouvons toucher, que nous mangeons, mais dont nous ne pouvons connaître la vraie nature que par la foi dans les paroles de Jésus. C’est là un exemple de ce qu’est la foi, en ce sens que, apparemment rien n’est visible, rien ne peut être constaté par l’expérience, tout est de l’ordre de l’invisible. Nous avons affaire à une réalité dans laquelle seule la foi peut nous introduire.
Institué le soir du Jeudi Saint, l’Eucharistie s’est passé quelques heures avant la mort de Jésus en croix car l’Eucharistie devait être en relation immédiate avec la Passion ; ce qui déjà introduit l’idée de sacrifice de la Nouvelle Alliance ; et c’est là, un des premiers aspects de l’Eucharistie. Il y a, certes aussi, l’idée de nourriture, qui est admirablement exprimée par Jésus lui-même dans son discours sur le pain de vie que l’évangéliste Jean développe admirablement dans son évangile. Enfin, il y a l’aspect de l’Eucharistie en tant qu’elle est donnée à l’Église. C’est elle qui, en rassemblant l’Église, en exprime et en réalise l’unité.
Ces trois aspects de l’Eucharistie ont été affirmés par le Christ lui-même et aussi par l’apôtre Paul, dans ses lettres. Mais ces fonctions de l’Eucharistie, sacrifice, nourriture, sacrement de l’unité, supposent toutes que le Christ est véritablement présent avec son corps et son sang dans le pain et le vin consacrés.
Quand Jésus dit sur le pain : « Ceci est mon Corps ». Ce sont là des paroles simples, des paroles qui ne peuvent pas être plus simples. ( Il y a un sujet, un verbe et un complément : « Ceci est mon Corps ».) Si maintenant nous nous reportons au discours sur le pain de vie rapporté par l’apôtre Jean, nous sommes frappés par la force et le réalisme des affirmations de Jésus. C’est un de ses discours les plus étonnants…
            Jésus se présente aux hommes comme nourriture, comme un pain venu du ciel, le pain donné par Dieu lui-même. Alors c’est vrai que nous comprenons bien que Jésus est d’abord pain de vie par sa Parole ; il nous nourrit de sa vérité et de sa doctrine ; puis, à partir de là Jésus passe au mystère de l’Eucharistie. C’est à ce moment-là que son discours devient d’un réalisme presque choquant : « Celui qui mange ma chair et celui qui boit mon sang a la vie en lui ». Et comme s’il craignait de ne pas être compris, il répète la même affirmation plusieurs fois, à tel point que les auditeurs de Jésus en sont scandalisés.
Il ne faut pas oublier que selon la loi juive, le sang est considéré comme le symbole de la vie et il était absolument interdit d’en faire une nourriture. « Ce langage est trop fort ! Qui peut l’écouter ? » diront ces juifs qui suivaient Jésus.
Et un grand nombre de personnes et même des disciples quittent Jésus à ce moment-là. Ce qui peut nous frapper dans l’attitude de Jésus, c’est qu’il ne rétracte pas un seul mot de ce qu’il a dit : il a été bien compris. Jésus va simplement dire à ses apôtres : « Voulez-vous partir, vous aussi ? ».
C’est alors que Simon-Pierre fait cette réponse pleine de confiance : « Seigneur, à qui irions-nous, tu as les paroles de la vie éternelle » (Jn 6,67). Les apôtres n’ont sans doute pas mieux compris que les autres, mais l’amour qu’il ont pour Jésus leur donne l’audace de poser cet acte de foi et de ne pas l’abandonner ; cette fidélité leur donne déjà la grâce d’entrer dans ce grand mystère de l’Eucharistie qu’ils recevront plus tard.
Alors, il nous faut croire en cette présence de Jésus dans le pain et le vin consacrés et croire en même temps que cette présence n’est pas comme les autres. Il n’y a aucun mot pour l’exprimer, il n’y a pas d’autre exemple de ce mode de présence dans la nature. Ce mode est pour ainsi dire spirituel, mais il n’en est pas moins aussi réel, sinon plus, que celui d’un être de chair et de sang. Jésus lui-même, sans rien retirer du réalisme brutal de son discours le suggère dans sa conclusion sur le pain de vie : « C’est l’esprit qui vivifie, la chair ne sert de rien » (Jn 6,63). Telle est notre foi chrétienne, frères et sœurs, simple et forte.
            Mais dans le sacrement de l’Eucharistie, nous affirmons aussi que nous sommes mis en relation avec le sacrifice de la Croix. Si toute notre vie chrétienne consiste à imiter la vie de Jésus, nous avons donc aussi à revivre sa Passion et sa mort en croix, et c’est ce qui donne un sens caché et presque infini à nos souffrances, à nos peines, ainsi qu’une valeur de communion à toute souffrance, au nom de l’humanité. Un des fruits de la communion au sacrifice eucharistique sera précisément de nous aider à vivre toujours plus en communion avec le Christ.
            C’est à cela que notre Mère Ste Thérèse nous rappelle dans ses écrits quand elle dit à ses sœurs : « Lorsque vous revenez de la communion, faites-en sorte, puisque vous vous trouvez avec Notre Seigneur en personne, de fermer les yeux du corps, d’ouvrir ceux de l’âme et de regarder au cœur. Je vous le dis… si vous contractez cette habitude de le faire chaque fois que vous communierez… Jésus ne se dérobera pas… dans la mesure où vous désirez le contempler. Vous pourrez même y apporter tant d’amour qu’il se manifestera complètement à vous… Ne perdez pas une occasion aussi favorable pour traiter de vos intérêts que l’heure qui suit la Communion… Si, après avoir reçu le Seigneur, vous vous occupez aussitôt d’objets étrangers, si vous ne faites pas cas de lui… comment se donnera-t-il à connaître à votre âme ? ».
            Enfin, l’Eucharistie est bien le sacrement de l’unité, le sacrement qui construit le corps du Christ et par notre communion au Christ nous sommes invités à nous unir à tout instant à l’adoration et à rejoindre la prière de Jésus à son Père. Il est heureux que l’adoration Eucharistique soit remise à l’honneur depuis quelques années dans certaines de nos églises car dans notre monde sécularisé et imprégné de matérialisme et d’activités incessantes, les hommes ont plus que jamais besoin de s’accrocher à des signes de l’invisible et l’Eucharistie en particulier nous est un rappel de la présence du Christ au milieu de nous.
            Alors, frères et sœurs, en cette solennité du Très Saint Sacrement, rendons grâce au Seigneur  pour le trésor inestimable qu’il nous a légué dans le sacrement de l’Eucharistie. Demandons au Seigneur ce matin, pour chacun de nous et pour tous les chrétiens, la grâce d’une plus grande fidélité à la fréquentation de ce sacrement. Que la messe dominicale soit véritablement source et sommet de notre vie chrétienne et que par notre fidélité nous suscitions des âmes généreuses, notamment de futures vocations sacerdotales, afin que le Christ continue de se donner au monde par ses ministres dans ses sacrements. AMEN.

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