Homélie du 24 février 2018 - 2e Carême


            « En mon cœur je t’ai dit : Je cherche ton visage, ton visage, Seigneur, je le cherche ; ne détourne pas de moi ta face ». Cet extrait du psaume 26 est une des deux antiennes d’ouverture de ce 2° dimanche de carême, où l’évangile est toujours, depuis de nombreux siècles, celui de la Transfiguration. Ce visage du Seigneur que nous cherchons trois apôtres ont eu la grâce de le voir  en gloire lors de la Transfiguration. La devise de notre Mère Sainte Thérèse d’Avila était : « Je veux voir Dieu ». Aujourd’hui nous célébrons une préfiguration pour nous de cette vision béatifique auquel nous sommes tous appelés.
            Tout d’abord dans le livre de la Genèse, notre première lecture, nous avons le récit du sacrifice d’Abraham. Le véritable Abraham c’est le Christ et le véritable Isaac c’est également le Christ. En célébrant l’Eucharistie nous actualisons ce sacrifice de Jésus qui s’offre pour notre salut par sa mort et sa Résurrection. Et la promesse de Dieu : « parce que tu as fait cela... je te comblerai de bénédictions, je rendrai ta descendance aussi nombreuse que le étoiles du ciel et que le sable au bord de la mer ».Cette promesse s’est réalisée à la lettre et pour toujours dans le Christ-Jésus.
            Dans sa lettre aux Romains, St Paul nous dit : « que Dieu n’a pas refusé son propre Fils, il l’a livré pour nous tous ». Ici c’est Dieu le Père qui représente Abraham, et Jésus uniquement Isaac. Mais Jésus est de toute façon réellement Abraham, en qui seront bénies toutes les nations de la terre. On considère que c’est sur le mont Moriyya, sur lequel sera bâti le temple de Jérusalem, que mille ans auparavant, Abraham a fait par sa foi le sacrifice de son unique enfant, et où justement Jésus fera le sacrifice de sa vie par sa crucifixion.
            Mais il y a une autre montagne que le Mont Moriyya, c’est celui de la Transfiguration, identifié traditionnellement comme étant le Tabor. Et c’est là que nous avons donc la Transfiguration du Seigneur. Cette théophanie, ou manifestation de Dieu, est capitale dans le mystère de la Révélation et de toute la Bible. Ce récit nous en a été transmis par les trois évangélistes, Matthieu, Marc et Luc, aussi il peut être bon de voir les quelques principales différences entre ces trois témoignages. Tout d’abord on peut signaler que le seul évangéliste qui y fut présent, Saint Jean, ne l’a pas écrit dans son évangile.
            Ce sont surtout Marc et Luc qui nous donne une ou deux précisions assez significatives pour nous. Pour Luc, c’est en priant qu’a lieu cette manifestation de Jésus, en gloire. En plus d’être considéré comme l’évangéliste de la miséricorde, Luc est celui qui emploie le plus le verbe prier dans son évangile et dans les actes des apôtres. De plus Luc est le seul qui emploie le mot exodos (en grec) en nous disant que Moïse et Elie parlaient du départ de Jésus à Jérusalem, en grec ce n’est pas le mot départ mais le mot exode. Cela est capital, puisque ainsi les deux témoins de l’Ancien Testament, Moïse et Elie parlent de la Rédemption, de la Pâque du Seigneur par sa mort et sa Résurrection. 
            On pourra noter aussi que les trois évangélistes rapportent cette parole de Dieu :         « Ecoutez-le ». Comme la Sainte Vierge dira aux noces de Cana : « Faites tout ce qu’il vous dira » (Jean 2,5).
            Enfin, un point très important qui en général n’est pas signalé, comme nous venons de l’entendre dans l’évangile de ce dimanche de l’année « B », alors que Matthieu et Luc citent Moïse en premier et mettent le verbe apparut au pluriel, Marc cite Elie en premier et met le verbe au singulier, puis ajoute Moïse : « ...Elie leur apparut (singulier) avec Moïse ». Or St Marc a été le secrétaire de St Pierre à Rome, on a d’ailleurs appelé, dès l’origine, l’évangile de Marc l’évangile de Pierre, sa version dans ce sens est donc sans doute la plus historique. D’ailleurs ensuite à la descente de la montagne on ne parle plus que d’Elie et non pas de Moïse. Cela vient sans doute du fait que le Christ étant le véritable Moïse comme il est le véritable Abraham, le véritable David,  et autres, alors qu’Elie par Jean-Baptiste se distingue ici de Jésus, lequel Jean-Baptiste a reçu le double esprit d’Elie et sa puissance, comme le dit l’archange Gabriel à Zacharie (Luc  1,17). Elie donc joue un rôle directement au service de la mission du Christ, lequel est Dieu fait homme.
                Même en ce temps de carême, il peut être bon de parler justement de la mission d’Elie dans le mystère de la Révélation. Le prophète Elie a été considéré comme le Précurseur du Messie dans l’Ancien Testament, par sa vie qui est une sorte d’analogie de celle du Sauveur, et aussi par la préparation du petit reste dans lequel naîtra la Vierge Immaculée Mère du Sauveur. Cela est signalé, entre autres, par le prophète Malachie plus de 4 siècles avant Jésus-Christ, lequel Malachie prophétise : « Voici que je vais vous envoyer Elie le prophète, avant que n’arrive mon Jour, grand et redoutable » (Ml 3,23). Et aussi dans le livre de ben Sirac, l’Ecclésiastique, à propos d’Elie: «... toi qui fut désigné dans les temps futurs pour apaiser la colère avant qu’elle  n’éclate » (48,10).Ces prophéties se réalisent d’ailleurs à la lettre actuellement, comme nous le verrons bientôt.
                Il y a ici dans ce sanctuaire N.D. de Pitié des frères carmes, c’est-à-dire de l’Ordre de Notre –Dame du Mont Carmel. Cet Ordre a pour Fondateur, ou pour Instituteur, ou si vous préféré pour Inspirateur, le prophète Elie, que nous célébrons liturgiquement le 20 juillet. Elie que vous voyez d’ailleurs sur ce retable devant vous.
                A travers la personne de Jean-Baptiste, lequel agit avec l’esprit et la puissance d’Elie, comme nous l’apprend l’archange Gabriel en le disant au prêtre Zacharie dans le Temple de Jérusalem. En la personne de Jean-Baptiste c’est donc aussi le prophète Elie qui est le Précurseur du mystère de l’incarnation, de la vie, de l’Enseignement, de la mort, de l’Ascension et de la Résurrection du Christ-Jésus. D’où l’importance de sa présence à la Transfiguration, avec Moïse, lesquels justement parlent du départ, du passage, de l’exode de Jésus à Jérusalem, donc sont au courant et prophétisent ce mystère de la mort et de la Résurrection du Christ.
                On pourra se rappeler que Notre Dame apparaît à Lourdes et livre son message les 15 premiers jours du carême. Nous sommes le 25 février, or il y a donc aujourd’hui 160 ans le 25 février 1858, Marie dit à Bernadette donc également à chacun d’entre nous : « Allez boire à la fontaine et allez vous y laver. Allez manger de cette herbe que vous trouvez là » (c’est-à-dire dans la grotte). Aussi pour notre conversion, c’est un peu le baptême d’eau de Jean-Baptiste, allons boire à la fontaine de la prière et de la pénitence, pour nous laver de nos péchés, et allons de même manger de l’herbe, c’est-à-dire  faire preuve d’humilité en obéissant aux ordres du ciel. Comme Sainte Bernadette obéissons à la demande de la Mère de Dieu qui est aussi notre Mère.
            En ce temps du carême, à la Transfiguration, Dieu le Père nous demande d’écouter son divin Fils, aussi avec l’aide de Marie qui nous dit « de faire tout ce qu’il nous dira », vivons ces jours de conversion et de pénitence, afin de nous préparer à bien suivre Jésus dans son exode à Jérusalem, que nous vivrons liturgiquement en commémorant la Rédemption à Pâque, et c’est ce que nous faisons déjà en célébrant l’Eucharistie. AMEN.

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